Se taper une broue et vider la bouteille…

Paul-Henri Hudon

HISTOIRE – Beaucoup de décapsuleurs, de tire-bouchons, de vide-bouteilles, de taste-vins vont se baptiser à la bière ce week-end ! Sauront-ils que notre lieu de Chambly a une longue expérience dans le jus de la treille ?

Les brasseries Yule, Frémont, Fryer, Demers, Grosbois, Normandin, Charroux, ont été des bouilleurs de cru locaux au cours des ans, jusqu’à… Unibroue, alors que Lamoureux, Petit, Bigonesse, eux, embouteillaient des caisses de douze cervoises et de vingt-quatre Labatt !

Aujourd’hui, Bedons ronds et Délires Délicieux font mousser le houblon malté au grand plaisir des buvards exigeants. Il y a eu aussi d’autres lieux où le brock de broue se perdait dans les gosiers assoiffés: un militaire anglais, démobilisé, William Henry Boyd (1805-1848) et son épouse Ellen Boyd (1803-1854),  servaient à boire en 1847, à l’angle des rues Beattie et Bourgogne, à Chambly. Tout comme fera la Madelon aux Poilus de la guerre en 1917, quand on lui prenait la taille ou le menton.

C’est ainsi que Boyd, ancien sergent d’un régiment, qui tenait la cantine (lire taverne) des casernes, se plaignait souvent de l’absence de troupes à Chambly, En 1848, il s’imagina qu’en incendiant les casernes, ce serait le moyen de faire revenir les soldats. Chose dite, chose faite. Incendie. Enquête. Accusations. Boyd dénonce un Canadien du nom de Lapointe. Mais un nommé Chartier, barman chez Boyd, rétablit les faits, dénonce Boyd comme l’incendiaire et le fait mettre en taule. Arroseur arrosé !

M. Dulude, le nouveau propriétaire de l’hôtel Sainte-Thérèse, mieux connu sous le nom de Half Way House vient de faire des améliorations considérables à son établissement. Le Central House, autre nom de ce débit, bien connu des voyageurs servait de relais, de pause pour les charretiers du canal.

Près du pont 7, cet hôtel, dit-on, offrait de plus une chambre d’hôte plus bordélique de passage que romantique de paysage. Bien sûr, c’est ce qu’on racontait au presbytère. Les charretiers du canal, eux, juraient par tous les dieux qu’il n’y avait aucune p’tite vertu dans ce lieu au divin nectar. On ne faisait qu’aligner les bouteilles vides.

(La Minerve, 3 février 1848. Notaires Alexis Mercille, 15 juin 1846 et Paul Bertrand, 2 septembre 1847. Le Canada Français, 1 décembre 1905).